La parabole de l'oiseau exotique couvé par une poule
Cette parabole va contribuer à nous aider à mieux comprendre le «gué» culturel que nous devons traverser en tant que communauté chrétienne. Nous nous inspirons d'un conte reproduit dans l'excellent livre* de Marie-Madeleine Davy qui a consacré une partie importante de sa vie à la question de la symbolique des éléments naturels dans l'expérience spirituelle. Nous faisons aussi référence au théomimétisme.
* La nature et sa symbolique, Albin Michel, 2015
Voici donc le conte
Un oiseau incapable de voler se déplaçait, dans la basse-cour, à la manière d'un poulet. Toutefois, il n'ignorait point que les oiseaux possèdent normalement le pouvoir de s'élever dans les airs. C'est que cet oiseau avait été couvé accidentellement par une poule, lui qui ne faisait pas partie de la branche des gallinacés. Personnellement, il ne savait pas comment il avait atterri sous les ailes de la poule. La question suivante le taraudait journellement: comment prendre mon essor? La gratitude éprouvée envers sa bienfaitrice freinait sa nature. De plus, il vivait parmi des congénères qui avaient certes des plumes et des ailes, mais ne savaient pas vraiment les utiliser ou sur un espace très restreint. Alors, que lui, il observait ces oiseaux qui planaient très haut dans le ciel, portés par le vent. Du fait de son entourage, il ne pouvait pas répondre à sa propre réalité. Le conte se termine par une morale: lorsque l'homme se tient en dépendance d'autrui, il risque de ne jamais répondre à la «démangeaison des ailes».
Qu'est-ce que ce conte a à voir avec la spiritualité chrétienne?
Il est clair qu'un conte ou une parabole ne peut pas s'interpréter en utilisant tous les détails de l'histoire. Il faut en tirer la pointe, comme pour les paraboles du Christ.
La culture de l'écrit, de l'école, boostée par le levier technologique de l'imprimerie, a couvé la nouvelle culture numérique. Je ne les oppose pas, mais je constate aussi qu'on ne peut plus parler d'évolution entre l'ancienne culture et la nouvelle. Il y a une vraie rupture, même si ces deux cultures ont bien des ressemblances, comme nos deux «oiseaux». Ils ont des ailes, ils pondent des œufs pour se reproduire. Que voudrait dire la «démangeaison des ailes»? Elle est justement liée à ce monde émotionnel qui nous pousse à «voler», alors que le monde scolaire a les pieds sur terre, dans la basse-cour de l'école. Il s'élève par la pensée, inspirée du modèle philosophique, la manière de penser l'existence, de l'articuler sur la réalité. Je parle ici d'outils intellectuels, pas du contenu philosophique.
La basse-cour gérée par nos coqs académiques
Désolé, là je tombe dans une vilaine caricature qui sent la jalousie, moi qui n'ai même pas le bac. Pourtant, je ne rechigne pas à consulter nos théologiens qui, avec leur longue vue analytique, décrivent très bien le comportement de ces oiseaux planeurs émotionnels, voire mystiques. Ce que je leur reproche, c'est qu'ils découragent les chrétiens par leurs théologies et leurs écrits de se lancer dans les airs du Saint-Esprit, sur les ailes de la foi, comme le titre d'un ancien chantoir. Le brave théologien conservateur Scofield n'a pas trouvé mieux, avec sa théologie des dispensations, que de décréter que les dons du Saint-Esprit étaient seulement réservés à la première église des Actes des Apôtres. Elle a laissé de profondes traces. Ne parlons pas de nos théologiens conservateurs qui montent sur leurs egos (ergots) pour promouvoir la spiritualité diplômée, celle de la basse-cour. Elle a fait ses preuves et continuera à le faire, sauf qu'une partie de la spiritualité actuelle a tendance à quitter la basse-cour. À leur tour, les «planeurs», comme moi, ont la prétention de mieux comprendre le monde de Dieu à partir de mes élucubrations «hautaines».
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L'inversion des courants atmosphériques
C'est une autre réalité dont on peut s'inspirer. Toute l'histoire de l'Église est pétrie de ces phénomènes d'inversion. À la Renaissance, le courant «froid» des Calvin a reconstitué la basse-cour où on se concentre à garder les pieds sur terre. Le calviniste dirait «les pieds dans la Bible». On ne s'envoie pas en l'air, sauf par la pensée. Aujourd'hui, les «planeurs» du Moyen Âge inspirent une partie de la chrétienté en misant sur l'émotionnel, le visuel. Phénomène intéressant, c'est le groupe musical Glorious dont les deux frères fondateurs, dont l'un est prêtre, sont catholiques et ont un large impact sur les Évangéliques classiques. En novembre 2024, ils vont faire un concert dans un rassemblement éminemment évangélique.
Une expérience cyclique
On a trop vite décrété que le Christianisme n'avait rien à voir avec l'aspect du renouvellement cyclique, souvent développé en philosophie. Nous prônons une théologie linéaire qui a un début et une fin. Pour l'Histoire de l'Église, c'est pareil. Lorsque je parle de cycles, je me réfère à ceux installés par le Créateur: par exemple, les cycles saisonniers. Ce sont des facteurs de renouvellement de la création. Ainsi en est-il pour moi du développement de l'Église, qui elle, est aussi soumise à des cycles. Nous vivons aujourd'hui un passage entre deux cycles socio-culturels et spirituels. Entre le froid et le chaud qui produisent aussi des perturbations, comme dans le domaine de la météo.
Comment vivre ces cycles entre le « poulailler » spirituel et l'immense ciel des «oiseaux-planeurs» et migrateurs
Il faut développer un savoir et une pratique du mixage, dans le même style où l'on mixe la musique à partir d'une console électronique. Le groupe de musique Glorious nous donne un exemple à suivre. Ils intègrent aussi des évangéliques dans leur groupe, ils chantent dans des rassemblements purement évangéliques. Ils développent l'École Pierre.
Autre exemple de mixage très local. Une communauté évangélique, à Meyrin, dans la banlieue genevoise, organise depuis de nombreuses années, pendant la période estivale, tous les cultes en commun avec la paroisse réformée du lieu. Le rassemblement du dimanche matin change chaque fois de lieu de culte et aussi de prédicateur.
Reste l'aspect principal
Autant dans la basse-cour que dans le ciel, nous devons apprendre aux chrétiens à « voler » vers le paradis, soit en pensée, soit à l'aide de l'émotion, mais surtout en pratiquant la foi chrétienne.
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PS: Petite autocritique
Mes images sont composées avec l'aide de l'IA. Elles sont très «moyen-âgeuses». Pas du tout inspirées par le siècle des Lumières et du protestantisme calviniste!