Face au réchauffement culturel, faut-il changer de «cépages» spirituels?

28 Septembre 2023, 02:14am

Publié par Henri Bacher

Ce post m'a été inspiré par un article paru dans la Revue du Vin de France. Des vignerons de l'Aude, face au réchauffement climatique, changent de cépage pour sauver le vin. Rien que ça! Paraboliquement, comme chrétien, on peut se demander s'il ne faudrait pas changer de spiritualité pour sauver la foi en Europe? Et par ricochet les communautés chrétiennes. La Bible fait largement référence à la vigne, donc s'intéresser à des cépages, pour trouver des réponses, c'est presque «biblique». Nous utilisons à nouveau la grille d'interprétation du «théomimétisme».

Pourquoi changer de cépages, alors que la teneur en alcool a augmenté de deux degrés en quelques décennies?
C'est la même question qu'on peut se poser en voyant la qualité de la formation de nos élites pastorales boostées par nos facultés de théologie, en constatant aussi les nouvelles possibilités de diffusion du message chrétien sur les réseaux numériques, etc. Ces vignerons ont une autre réponse. Ils ne se contentent pas de la teneur en alcool. Pour la communauté chrétienne, on pourrait parler de «teneur émotionnelle». Voici leur constat tiré de l'article:

Les vendanges, à cause du réchauffement, se font ainsi de plus en plus tôt, parfois dès fin juillet. Cette année, en 2023, en Alsace, elles commencent fin août. Alors que généralement elles commencent un mois plus tard. On s'arrange ensuite avec des assemblages, car si le fruit est chargé en sucre, les pépins ne sont souvent pas encore mûrs et donnent un goût astringent au vin.

Notre handicap majeur pour faire face aux changements
Les changements climatiques ne se font pas d'une manière constante et régulière. Elles se font généralement d'une manière abrupte. Pas forcément sur plusieurs décennies, mais, en tout cas, pas sur plusieurs siècles. C'est donc difficile de programmer les changements à faire. Souvent les chrétiens pensent comme certains climatosceptiques: on exagère! Il y a des communautés qui investissent dans de nouveaux locaux, sans se rendre compte que depuis des années, il y a une certaine usure du potentiel. La plupart du temps, il y a une migration de personnes entre les communautés. De plus, on compare nos chiffres de fréquentation à ceux d'autres communautés au lieu de tirer des conclusions en relation avec le bassin de population où se trouve l'église.

Ne pas sauter dans le futur, mais s'inspirer du passé
Antoine Robert, gérant de la coopérative Castelmaure, avec l'aide de la chambre d'agriculture, a aussi retrouvé dans son domaine de vieilles variétés de carignan, parfois âgées de plus de cent ans et d'autres cépages oubliés. Il les a placés dans une parcelle «conservatoire», en espérant y trouver des variétés adaptées à la chaleur. Une autre vigneronne dit ceci: ces cépages, qui n'arrivaient pas à maturité dans le sud de la France, il y a 25 ans, ont trouvé aujourd'hui un terrain de prédilection. Sur les dix hectares du Château Cicéron, elle se réjouit de contrôler plus facilement l'alcool et l'acidité de ses vins. Il a néanmoins fallu d'abord arracher les vignes existantes, faire des analyses de sols, entrer dans un protocole d'expérimentation européen, replanter et attendre que les vignes soient assez matures avant de faire une première vinification, plus de dix ans plus tard.

Le dilemme pour nos églises réformées et évangéliques
Il est assez simple: produire du «vin spirituel» acide, astringent ou des grands crus comme ceux des Calvin et des Luther qui ont changé de «cépages théologiques» quand justement le «climat» culturel se refroidissait. Aujourd'hui nos «cépages» théologiques ont besoin de se renouveler dans le passé et j'irais beaucoup plus loin que les réveils du 19ème siècle. Il faut aller au Moyen-Âge, surtout à partir du 10ème siècle. Ce n'est pas parce que les 14ème et 15ème siècle ont produit de la «piquette» spirituelle qu'il faut négliger les belles réalisations d'avant. Les marches pour Jésus dans l'espace public sont en fait un «cépage» de la spiritualité moyenâgeuse. Les «pasteurs-vignerons» ont sélectionné le «cépage ancien», mais ils se sont aussi donnés la peine de l'améliorer comme le font les œnologues pour la vigne. Exit l'image du Christ ou de la Vierge Marie qu'on porte en effigie, mais production d'une ferveur de témoignage public.

Il faut apprendre à sélectionner les bons cépages du passé
Je n'en citerais que quelques-uns:

La confession
Pas celle obligatoire pour être pardonné par le prêtre, mais qui peut se faire entre amis de confiance, dans le couple ou pourquoi pas avec un pasteur. Il n'y a que Dieu qui peut pardonner, mais avouer ses péchés à quelqu'un de confiance peut faciliter l'acceptation du pardon.

Marcher pour méditer
Les chrétiens du Moyen-Âge, marchaient sur des chemins de pèlerinage. D'ailleurs les protestants ont créé un chemin européen des camisards qui fuyaient la persécution. Le théologien mennonite Frédéric de Coninck a sorti un livre sur son expérience sur le Chemin de Compostelle (Paris/Compostelle: Dans le pas d'un Galiléen).

La gestuelle avait une grande importance
Génuflexion, signe de croix, pénitence sur les genoux, etc... Les évangéliques, en particulier, retrouvent un semblant de gestuelle au travers du chant communautaire: on lève les bras, on danse, mais ce ne sont pas encore des danses rituelles. Elles s'inspirent peut-être plutôt de la scène culturelle musicale non chrétienne.

La prééminence de l'oralité
C'est sûrement là qu'il faudra mettre l'accent pour se renouveler: étudier comment ils ont transmis la foi dans un monde qui ne lisait pas ou très peu. Nous entrons dans une oralité électronique.

Le Moyen-Âge était très lié aux images saintes, du fait que la grande majorité de la population ne lisait pas et que les livres étaient plutôt rares et chers. Notre blog contribue à revisiter la spiritualité par l'émotion, par une recherche de «visualisation» du message de l'évangile.

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