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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Quels sont les métiers et spécialités d'avenir pour l'église qui n'existent pas encore actuellement?

11 Août 2022, 08:00am

Publié par Henri Bacher

Quels sont les métiers et spécialités d'avenir pour l'église qui n'existent pas encore actuellement?

Le métier de pasteur ou de théologien, tel qu'on le conçoit aujourd'hui, n'existait pas (encore) dans le Nouveau Testament. Aujourd'hui on parle de coach pastoral, d'administrateur sur les réseaux sociaux, de spécialiste de relation d'aide, de conseiller en communication, d'influenceur, de vidéaste, de bloggeur, etc... La société s'accélère, quels seront les métiers dont l'église aura besoin en 2030, 2040, 2050? Petite investigation avec un zeste de spiritualité-fiction.

La trajectoire futuriste du moine copiste

Imaginez ce moine, au Moyen-Âge, qui maniait le lettrage, écrivait à la main avec un certain type d'écriture, peignait des enluminures, à qui on explique que son métier allait disparaître, mais pas forcément l'écriture. Que celle-ci allait se transmettre par copier-coller sur un écran qui ressemble vaguement à sa table de travail. Que les textes de la Bible, qu'il recopiait inlassablement, allaient se transformer en audio et que son texte allait s'entendre au lieu d'être lu. Le monde de la Bible n'a pas disparu, mais il a été complètement chamboulé. Sa table de travail s'est transformé en imprimante qui peut sortir un texte biblique en pesant sur un bouton.

Pour évoluer, le métier de copiste a laissé la place aux imprimeurs, aux informaticiens, aux concepteurs d'algorithmes. La théologie du monastère n'a pas complètement disparu, mais elle a dû s'adapter pour répondre aux nouveaux besoins, générés par les nouveaux outils culturels. Et constatation importante: le moine copiste, pour évoluer a dû sortir de son monastère, comme un Luther, bien que le réformateur allemand n'était pas forcément un copiste.

Même si actuellement l'informatique est aussi entrée dans le monastère, les nouveaux métiers se sont élaborés à l'extérieur. Ce qui veut aussi dire que les nouveaux métiers dont on a besoin aujourd'hui, vont s'élaborer à l'extérieur des facultés et instituts classiques de théologie.

Cette question des nouveaux métiers pour l'industrie et le monde commercial se pose aussi en dehors de l'église:

@bfmtv Quels sont les métiers d’avenir ? #metier #avenir #inventions ♬ son original - BFMTV

Le basculement qui nécessite de nouvelles innovations

À la fin du Moyen-Âge, le monde européen a basculé, sous l'impulsion de la Renaissance et de l'invention de l'imprimerie d'une culture fortement matinée d'émotionnel dans une culture plus rationnelle. Cela ne s'est pas fait du jour au lendemain, mais au fil des siècles, les métiers phares dans l'église, toutes confessions confondues, se sont orientés vers des activités qui demandaient prioritairement la maîtrise de l'écrit et de la lecture. Plus on voulait gravir dans la hiérarchie des responsabilités ecclésiastiques, comme pasteur ou théologien, plus il était nécessaire de savoir lire et écrire et maîtriser les outils d'analyse inhérents à la culture de l'écrit. 

Comment pourrait se former le pasteur?

Le nouveau pasteur ou théologien, qui va se former au contact du monde de l'imagerie électronique et numérique devra à la fois vivre, réfléchir et se former dans les lieux où se pratiquent ces nouvelles technologies: plateau de télévision, lieu de tournage d'un film, studio graphique, audio, laboratoire qui élabore des algorithmes, théâtre, école de danse, atelier d'artistes, etc... Ça ne suffit plus de suivre un cursus universitaire classique de théologie et de faire des stages dans ces nouveaux lieux de productions culturelles. Simplement parce que la connaissance scolaire surtout, en ce qui concerne, les sciences qui ont trait à la culture, au social, au religieux ne peut simplement plus répondre à ces nouveaux besoins. 

On se retrouve dans le monde de Jésus. Il a dû sortir de l'univers de la synagogue lié à l'étude des textes. Sa théologie, même s'il était Fils de Dieu, s'est élaborée au contact de la réalité humaine, en fréquentant les lieux où vivait son public cible.

L'apôtre Paul n'est pas resté à Jérusalem dans une école de type religieux chrétien, mais sa théologie s'est formée lors de ses voyages autour de la Méditerranée.

Le principal obstacle pour ces nouveaux métiers, c'est la question du diplôme qui sanctionne, l'accès à une responsabilité. C'est aussi une manière subtile de garder une certaine emprise sur le «business» lié à la formation, même si on met en avant la qualité de l'étudiant-qui-a-acquis-un-niveau-acceptable pour être pasteur. 

La sélection au ministère devrait se faire sur la base du talent, de l'expérience acquise, du modèle spirituel que le candidat représente et vit, autant du point personnel que familial. On peut tout à fait imaginer que sa formation puisse se faire au contact de la réalité d'un studio graphique, d'une étape en faculté de théologie classique, sans que celle-ci donne son «imprimatur» final. 

Vous remarquez que je ne veux pas détruire la faculté ou l'institut de théologie, mais ce ne sont plus eux qui peuvent être les formateurs privilégiés et exclusifs pour nos cadres pastoraux.

Ne pourrait-on pas s'inspirer de la validation des acquis de l'expérience (VAE) que Pôle-Emploi a mis au point en France? Avec la participation de certaines communautés habilitées à donner leur accord final par une évaluation communautaire. Un accord final qui n'authentifie pas le candidat sur la base de connaissances acquises dans le domaine académique, mais qui discerne, spirituellement parlant, son aptitude à exercer un ministère.

Les chantiers de base pour les nouveaux métiers

Quelques nouveaux métiers 

- Le sélectionneur de contenu. Le chrétien lambda est tellement submergé de contenu religieux qu'il ne sait plus qu'elles sont les sources fiables. Il faudrait simplement des personnes formées qui trient ces contenus, sans les passer par le filtre de la théologie de son groupe socio-culturel religieux ou en les précisant.

- Le chercheur (théologien, artiste, communicateur, etc...), spécialiste du monde de la culture de l'oralité électronique. Comment repenser l'aspect théologique et spirituel dans un contexte oral, sans le recours au texte? Il ne faudrait pas laisser ce travail uniquement aux mains du théologien académique.

- Le métier de «paraboliste». Celui qui trouve des paraboles tirées de la vie quotidienne ou des réseaux sociaux et qui apprend à les interpréter, sans trahir le texte biblique qui est utilisé comme référence.

- Le «théomimétiste». Celui qui apprend à interpréter le livre de la Création de Dieu (selon Romains 1:20).

- Le metteur en scène cultuel. Les rencontres dominicales de la communauté chrétienne qui s'apparentent de moins en moins à l'école, auraient besoin de personnes qui réagencent le déroulé de la cérémonie pour qu'elle ne devienne pas simplement une copie de la scène culturelle de la télé et des réseaux sociaux.

Cette section de nouveaux métiers peuvent être des occupations partielles rémunérées

Ces occupations, en relation avec le «care», le prendre soin, sont souvent promues dans une activité bénévole, mais il se peut que dans le cadre de la communauté, on engage, selon un contrat spécifique, des «talents» pour aussi servir les gens extérieurs à l'église. L'aumônerie des hôpitaux existe déjà, mais là, il s'agit d'un travail d'accompagnement, un peu à l'image des lieux de relation d'aide dans le domaine du «psychisme». Il faudra résoudre le problème de la rémunération qui ne doit pas être liée à une relation marchande entre la personne aidée et son accompagnateur. C'est le coche qu'on a loupé dans les questions de relation d'aide.

Ces personnes doivent avoir traversé les mêmes problèmes de vie et ne devraient pas être uniquement formées «théoriquement» ou par stages interposés. Cette spécificité devrait aller plus loin que la consolation, l'écoute, l'encouragement.

- Conseiller et accompagnateur (homme et femme) pour des personnes qui vivent un traitement thérapeutique lourd (cancer, etc...). Exemple: Marie Ray est régulièrement sollicitée par l'hôpital qui a soigné son cancer, pour aider des malades.

- Conseiller et accompagnateur (homme et femme) pour des migrants pour les aider à s'intégrer dans la société accueillante. Ce métier dépasse largement l'aspect strictement social.

- La vie numérique devient de plus en plus complexe et génératrice de déséquilibre et beaucoup de personnes se «perdent» dans le labyrinthe des algorithmes. Il ne s'agit pas seulement d'une aide technique, mais des accompagnateurs pour maîtriser, par exemple, les addictions multiples. Les manipulations psychiques, politiques, mercantiles.

Conclusion

Dans un monde de plus en plus complexe, le pasteur classique avec son bagage acquis à la faculté ou à l'institut ne suffit plus. Il a besoin d'être secondé par des accompagnateurs qui chacun aura sa spécificité. Le pasteur deviendra, dans cette nouvelle configuration un coach qui fera travailler une équipe. Les petites communautés ne pourront pas se payer un staff rémunéré comme nous le suggérons, mais pourquoi ne pas mutualiser les talents entre plusieurs communautés qui se retrouvent sur le même espace géographique?

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