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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Valoriser l'acquis de l'expérience (VAE) pour renouveler nos staff pastoraux

21 Octobre 2024, 07:00am

Publié par Henri Bacher

À l'heure où Pôle emploi en France réactualise et implémente son service d'Acquis de l'expérience (VAE) pour offrir l'accès à des emplois plus valorisants à des non-diplômés, on devrait se poser la question pour la formation pastorale.

 

Qui est concerné?
Selon l'article susmentionné, par principe, la VAE est accessible à tout demandeur, quel que soit son statut professionnel. La seule condition imposée est de justifier d’une ou plusieurs années d’expérience en lien avec le titre visé.

Un exemple authentique
Une de nos connaissances, qui a quand même un bac en poche, pas comme le rédacteur de cet article, vient de rentrer de trois ans de travail parmi les enfants de la rue dans la capitale tchadienne. Elle avait tout au début, après sa scolarité, monté un service pour familiariser les écoliers de la région où elle habitait au contact avec des animaux. Elle transportait dans les écoles qui l'accueillaient, une petite sélection de petits animaux ou de volailles. Par la suite, elle a travaillé comme ambulancière avant de rejoindre le Tchad. En rentrant, tout récemment, elle suit pendant six mois une formation biblique. Voilà une personne qui serait un exemple parfait pour entrer dans un processus VAE avec comme objectif d'intégrer une équipe pastorale ou même devenir pasteure d'une petite communauté. Surtout qu'une personne qui aura passé quelques années en faculté ne voudra peut-être pas se coltiner une toute petite communauté.

Elle a un solide sens de l'innovation, une expérience de vie, et en plus transculturelle, que bien des diplômés universitaires qui n'ont suivi que des cours théoriques, assis à une table, n'auront jamais pour commencer un ministère pastoral. Cette jeune femme aura toutes les possibilités, en intégrant une église, de parfaire ses connaissances théoriques, ce qu'elle est en train de faire. Avec l'avantage de pouvoir mieux choisir ses programmes de formation complémentaires au vu de son expérience et des découvertes qu'elle aura faites sur ses vraies capacités intellectuelles et émotionnelles.

À qui faudrait-il confier ce service de validation?
Pourquoi le CNEF français et le Réseau Évangélique suisse ne pourraient-ils pas prendre en charge une telle prestation? Avec une équipe de professionnels pour faire ce travail de validation. Il ne faudrait pas confier cette responsabilité à nos instituts et facultés qui le feraient sûrement sur la base des connaissances du candidat ou de la candidate. Par contre, ces instances officielles labellisées pour former nos pasteurs pourraient mettre sur pied des formations complémentaires, pensées et paramétrées pour ce type de complément de formation. En tout cas, il ne faudrait pas proposer d'intégrer un cursus existant, même partiellement. Souvent, ces personnes n'ont pas la fibre scolaire pour se coltiner des enseignements qui touchent plus la tête que les «tripes».

Inverser le processus de formation de nos pasteur-es
Cette approche VAE met aussi en évidence que la formation pastorale devait se détacher du modèle scolaire et académique qui préconise d'abord de décrocher un diplôme avant de se lancer. Il est clair que celui qui s'intéresse, par exemple, à l'archéologie, à l'histoire de l'Église et des institutions cléricales doit les prendre par l'angle de la science, mais faire passer l'ensemble de la formation pastorale dans le moule «scientifique», c'est une aberration, même si la faculté ne diffuse pas seulement des cours de type scientifique. L'inversion devrait se faire par le changement de «locomotive». On commence par l'expérience, acquise sur le terrain de la réalité sociale, puis s'implémente par les apports plus scolaires ou académiques. C'est clair que lorsqu'on veut envoyer un robot sur Mars, il ne suffit pas de commencer par expérimenter le lancement de fusées artisanales. Mais l'Église ne ressemble pas à une planète. C'est avant tout un tissu social, qu'on aborde plus facilement par l'expérience que par l'analyse scientifique. C'est logique que l'académie ait peu valorisé les dons du Saint Esprit. Ils sont difficilement assimilables par la «science». Or, aujourd'hui, avec la montée de l'ésotérisme, de l'irrationnel, nos pasteurs n'ont que des outils théoriques pour analyser et maîtriser ce qui se passe. Alors que la demande spirituelle se situe à un niveau irrationnel et non rationnel comme la théologie classique.

Petite citation du théologien Jacques Ellul

Il dit ceci, c'est comme si notre société avait pris la logique de la machine qui est juste et bonne pour une machine et l'avait appliquée sans restriction à nos sociétés, à nos familles, à nos vies spirituelles, à la politique, à la communication.

Je conclurais cette citation par un bémol, même si Ellul m'a aussi inspiré, entre autre avec son livre «La Parole humiliée». Il fustige la technique, la logique de la machine, mais il ne s'est pas posé la question si l'imprimerie, le socle de l'école, un levier technologique mû par l'électricité, ne ferait pas partie de cette «machine»? Raison de plus de mettre en doute la formation de nos pasteurs qui sont formés dans le monde de la «machine» scolaire et académique liée au levier technologique de l'imprimerie.

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