Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Les nouveaux païens

5 Février 2024, 08:00am

Publié par Henri Bacher

Ce post fait partie d'une trilogie qui regroupe les nouveaux prêtres et les nouveaux croyants. Traditionnellement, le monde chrétien définit le «païen», comme celui qui ne pense ou ne croit pas comme lui et qui adore un ou d'autres dieux ou adhèrent à des philosophies de type religieux comme le bouddhisme. En Europe, il n'y a plus que l'islam qui se réfère encore à une Révélation basée sur un texte, à part bien sûr le judaïsme, le catholicisme, le protestantisme, l'évangélisme dans sa forme classique. Les religions vernaculaires, dans un monde non «catholisé», «protestantisé» ou «évangélisé» se basent sur des expériences mystiques se traduisant pas des rituels de type ésotériques ou chamaniques. Chez les incas, c'est carrément son chef suprême qui jouait le rôle de la divinité que j'utiliserai, comme exemple, plus tard dans le post.

Le paganisme occidental
C'est nouveau! Une grande majorité d'occidentaux se définit comme areligieux et plus «non-croyant». En ne voulant plus se définir «non-croyant», elle ne veut plus prendre comme référence un système religieux, quel qu'il soit, qu'elle a définitivement éliminé de son panthéon. Dans sa tête, elle a bien gobé, qu'on pouvait exister sans religions et que c'est plutôt une tare que de croire à des influences spirituelles externes, venant de l'au-delà. Elle a été encouragée dans cette attitude, car son niveau de vie a augmenté, sa couverture sociale et médicale est au top par rapport aux générations passées, surtout pour la classe moyenne, en Europe. Tout pays, dont la classe moyenne est fragilisée, est en crise et en déséquilibre. C'est elle qui donne les équilibres économiquement, mais aussi culturellement et religieusement parlant. C'est elle aussi qui détient les leviers culturels, médiatiques pour diffuser ses concepts areligieux, puisqu'elle pense avoir, de moins en moins, besoin d'un dieu qui la secoure, comme le pauvre qui n'a souvent que Dieu pour le sortir de la gonfle. Sa responsabilité aurait été de faire bénéficier les pauvres de notre planète de son «équilibre». Ce qu'en politique on appelle «ruissellement», mais qui n'est jamais ou peu appliqué.

Par quoi va-t-on remplacer les mécanismes religieux du passé?

Ce serait faire de l'anti-américanisme primaire que de prendre la Statue de la Liberté comme symbole du moteur d'une nouvelle tendance areligieuse puisqu'elle a été offerte en 1886 par les français. En attendant, c'est devenu le «way of life» de tout l'occident: la liberté éclairant le monde, surtout économique!
 

Le monde n'est et ne veut plus être cornaqué par des religieux. Dans beaucoup de pays, les religieux sont honnis, contestés, marginalisés. En occident, c'est évident avec le rouleau compresseur de la laïcité qui pousse le religieux sur les marges. Par quoi va-t-on le remplacer? Par l'argent et l'économie dont les américains et les européens ont été les promoteurs, tout en étant un facteur important de l'évangélisation moderne du monde. L'intelligence artificielle (IA) n'a pas été mise au point pour apporter aussi des solutions religieuses, éthiques, sociales, mais pour faire tourner la machine à engranger du pognon, tout en enrichissant la classe moyenne. Ce que le protestantisme de Calvin, malgré le fait qu'il a favorisé l'aspect économique et financier, n'avait pas comme but premier. Son «flambeau» était fondamentalement spirituel, ce qui a aussi provoqué un espace favorable à la pratique d'une éthique commerciale, de prime abord, non prédatrice et d'un «ruissellement» pour les plus pauvres. Je vous signale en passant que le banquier protestant du temps du réformateur, posait sa propre fortune comme garant de ses prêts. Il ne se cachait pas derrière une structure financière impersonnelle.


Mais cette culture de mamon porte en elle-même le germe de sa destruction... comme l'immense empire de l'inca, qui a disparu, en une seule journée, sous les coups de boutoir d'un conquistador espagnol qui n'avait qu'une poignée de soldats, face à un empereur accompagné par une suite de plusieurs milliers de notables et de soldats. Pourquoi? Lorsque Francisco Pizarro et ses hommes ont capturé l'inca, ses soldats n'ont pas bougé pour le protéger. Leur empereur-dieu a été capturé devant leurs yeux. C'est un réflexe qui se retrouve aussi avec le Christ, que ses disciples ont abandonné à la croix.

Une culture occidentale aux pieds d'argile
C'est bien ça notre problème: nous nous croyons invincibles. À l'abri d'une destruction massive, alors qu'on a beaucoup d'exemples géologiques, climatiques, comme la collision avec un astéroïde à Chicxulub, mais aussi tous les anéantissements dus au genre humain à cause des guerres économiques ou politiques. 
 

Profil du païen occidental

Il a abandonné les dieux tutélaires avec leurs religions officielles, le christianisme comme les autres spiritualités institutionnalisées. Il pense qu'il s'est débarrassé définitivement de l'imposition religieuse. Ce qu'il n'a pas compris, c'est que nous sommes dans une période culturelle qui ressemble à un épisode relaté dans les Juges (17:6) qui dit: À cette époque, il n'y a pas de roi en Israël. Chacun fait ce qui lui plaît, on se fabrique des «sous-dieux» de remplacement, car le vide existentiel ne se remplit pas aussi facilement, même avec le bien-être de la classe moyenne. Souvent ce sont des produits frelatés, des succédanés de type «religieux» tirés de l'ésotérisme, du chamanisme, de pratiques plutôt occultes. On ne leur attribue simplement pas la définition du religieux. 

Pour nous, le «roi», que l'occidental veut définitivement abattre, est remplacé par le pouvoir de l'argent qui va fonctionner avec les ficelles du religieux, sans le nommer «religieux». Dans ce texte des Juges (17 et 18) on raconte l'histoire d'un homme, du nom de Mika qui s'est créé à domicile son propre sanctuaire privé et qui a même embauché un de ses fils comme prêtre. On passe d'une activité spirituelle communautaire à une privatisation de la foi, avec sa propre formulation, comme cela nous plaît. L'autre jour, j'ai rencontré une jeune femme qui parlait régulièrement à ce qu'elle nomme «Univers», une sorte de force cosmique qui n'a pas de forme.

Le nouveau païen est allergique à toute forme spirituelle prédéfinie par des dogmes, des rituels. Pour lui, la spiritualité pourrait ressembler à cette musique qu'on écoute en faisant son jogging. Elle nous berce, nous accompagne, nous dorlote, plus qu'elle nous conseille, nous éduque, provoque en nous le «ruissellement». Il ne cherche pas des réponses pour ses problèmes de vie. Il prend un Doliprane spirituel pour calmer son angoisse, mais pour se sortir d'un vrai problème existentiel, il préférera plutôt consulter une voyante, un coupeur de feu, l'horoscope.

Une idée pratique pour parler à des areligieux d'aujourd'hui. C'est dans les cérémonies d'enterrement qu'on rencontre le plus souvent des areligieux. Le lien pointe sur une idée pour la prédication.

Commenter cet article