Une église sans murs?
C'est Éric Zander qui a lancé ce concept d'église sans murs. Je lui emboîte le pas pour schématiser, à ma manière, cette vision de ce que l'église devrait devenir ou être aujourd'hui.
C'est d'une structure de place de marché actuelle, en France, dont je me suis inspiré pour expliquer ma vision d'une église sans murs ou sans les murs. Jésus, dans le monde de l'évangile, c'est comporté comme sur une place de marché. Il circulait, il suivait le mouvement de la foule plus qu'il ne la précédait en se présentant comme leur messie. Il ne se comportait pas comme une star. Il ne haranguait pas la foule dans une synagogue qui avait pignon sur rue. Il était tellement discret, même dans le temple, que les agents des autorités de l'institution religieuse, n'arrivaient pas à le coincer. Il n'a été capturé que par trahison. La notion de place de marché permet aussi de sortir de la logique scolaire. L'école a besoin d'une salle de classe (fermée), la place a besoin d'espace pour circuler. Le marché est construit sur l'idée de l'offre et de la demande. L'école est là, non pour s'intéresser aux désirs et aux demandes des ses élèves, mais pour les «formater» selon une vision éducative. La place est liée à des transactions (financières), l'école est liée à l'éducation et des manuels. On ne demande pas à l'élève de croire ce qu'on lui apprend, mais de l'accepter comme une vérité qu'on ne discute pas. La transaction de la place a aussi son côté dangereux lorsqu'on la mélange avec l'argent. La transaction que Christ propose, c'est celle de la foi. Je ne peux t'aider que si tu crois en moi. Il y a un donnant, donnant. Il ne nous guérit pas contre notre volonté. Par contre et c'est le contrepied à la transaction, la foi ne s'achète pas avec des œuvres.
L'église est sur terre pour protéger
Observer l'image ci-dessus et surtout prenez d'abord en compte que la construction est une structure ouverte. Elle est conçue pour accueillir des marchands, avec leurs stands de marchandises. Le premier mot qui vient à l'esprit en observant cette structure, c'est la notion de protection des intempéries. Le rôle premier de l'église, n'est-il pas de protéger ses membres ainsi que ceux qui la fréquentent, des intempéries de la vie: malheurs, maladies, ruptures, échecs, désespoir, détresse, etc... On pourrait même étendre cette protection aux tentatives de mainmise sur l'église par des politiques, des pasteurs véreux, des doctrines destructrices, etc...
Nous avons longtemps cru que l'enseignement (de la Bible) allait relever le niveau spirituel des personnes, comme dans l'enseignement scolaire où on a cru que relever le niveau scolaire des élèves allaient leur apporter richesse, équilibre, bonheur. Ce n'est pas faux en soi, mais si l'Église, Corps du Christ est le navire amiral du sauvetage de l'humanité, elle n'est pas seulement là pour augmenter le savoir spirituel des gens.
Explication
Toujours avec la même consigne, je ne décris pas une réalité, mais je fais une projection intellectuelle et analytique sur une réalité. Qui peut être juste ou en partie fausse, la réalité est toujours plus complexe. Essayez d'abord de comprendre ce que j'ai voulu dire et faites-vous une opinion.
Dans cette structure, il y a plusieurs espaces, comme pour l'église, communauté chrétienne.
1. Dieu. Le Corps du Christ, ressemble un peu à cette structure globale. Je n'ai pas mis de cadre. Dieu, ni le corps de Christ, ne peut se cadrer. Mais ce Corps offre protection, supervision, structuration. Tout est construit en fonction de ce toit, comme l'église est «construite» en fonction de Dieu. Tout découle de ce «toit».
2. Fondement. Là aussi il n'y a pas de cadre. Ce qui ne veut pas dire qu'il ne faut pas avoir des doctrines, des interprétations, des concepts théologiques. Je voulais juste montrer qu'il faut faire attention de ne pas les maximaliser. La Bible fait partie de ce fondement, mais on en a fait souvent, une porte d'entrée exclusive à la spiritualité, sans prendre en compte que c'est surtout un livre de référence, pour vérifier nos doctrines de base et non pas un chemin balisé exclusif.
3. Les ministères. Ce sont les piliers de la communauté chrétienne. Désolé, cher pasteur, si tu penses que ta position «d'instituteur» spirituel est la plus importante.
Tu dois apprendre à partager ton rôle spirituel dans la communauté, avec celui du prophète, de l'évangéliste, du docteur, du théologien, du «thaumaturge», du voyant. Ne me traitez pas toute de suite de charismatique, mais lisez plutôt le texte de référence suivant: Éphésiens 24:11.
4. Les structures. Pour moi, ce sont des structures invisibles que l'utilisateur de la place de marché ne voit pas. Ce n'est même pas important pour lui. Ce sont les assemblages humains, les organisations internes des communautés chrétiennes. Elles peuvent être d'ordre théologique, ecclésiologique, organisationnel, technique, culturel. J'ai mis la couleur verte.
Pratiquement comment vivre une église ouverte?
On se dit ouvert à d'autres opinions, à d'autres courants théologiques. On est même œcuménique. On accepte des couples divorcés, remariés. On fait même un effort pour accueillir des homosexuels. Ce n'est pas de cette ouverture que je voudrais parler, mais je commencerais par un aspect tout à fait pratique. Pendant vos activités liturgiques, le public peut-il entrer et sortir comme il veut? Comme sur une place de marché? Votre public est-il prisonnier d'un lieu (salle), d'un horaire? On a un peu allégé ces contraintes en autorisant, dans certaines communautés, de pouvoir se déhancher pendant la louange, à taper des mains et des pieds. C'est déjà pas mal. J'ai assisté une fois à un culte où il y avait au fond de l'espace cultuel une machine à café et les gens pouvaient aller se servir tout au long de la cérémonie. Et pourquoi pas? Le premier message, non verbal, qu'on donne à des personnes, lorsqu'on pratique l'ouverture style de place de marché, c'est que le contact avec la spiritualité chrétienne est libre de toute contrainte: pas besoin de suivre le rituel, pas besoin de payer une entrée ou une sortie. Si on invite un pas-encore-chrétien au culte, il faudrait pouvoir lui dire que si ça ne le branche pas, on va quitter le lieu avec lui. Si on s'ennuie, on se tire. Dans le système scolaire, on ne peut pas sécher un cours, sous prétexte qu'on s'ennuie. On le subit. Nos espaces cultuels devraient être ouverts sur la rue pour que n'importe qui puisse y entrer et en sortir quand il veut. Il y aurait bien des curieux qui feraient le pas et qui resteraient peut-être crochés par l'ambiance, par la joie de chanter ensemble, par une prédication qui leur parle, justement à ce moment-là. En construisant un nouveau bâtiment d'église, il faudrait y penser. En visite à Istamboul, ma femme et moi sommes entrés dans plusieurs mosquées où d'autres gens priaient à la manière musulmane et nous, on a prié le Christ au milieu des autres. Et si on ouvrait le dimanche matin des espaces religieux (pas multireligieux), juste pour se recueillir, peut-être avec un fond musical discret adéquat. Nous, il faut qu'on enseigne le dimanche matin! Il faudra, bien sûr, être créatif, pour savoir circuler sur la «place de marché» pour discerner ceux qui ont besoin de protection divine, de soulagement, de guérison, d'écoute, de conseils ou peut-être juste besoin d'un café.