Un culte ludique? - Idée de prédication
Cette idée de prédication touche à quelque chose de tabou dans nos communautés: on ne vient pas à l'église pour s'amuser. C'est du sérieux comme la crucifixion et pourtant dans la Bible, beaucoup de belles paroles spirituelles ont été prononcées lors d'un repas. Pensez-vous qu'on participait à ce genre de repas uniquement en mâchant avec sobriété un gigot d'agneau, avec une gorgée de vin, à la mesure du gobelet en plastique, du dimanche matin, qui nous fait miroiter le festin du Royaume? Nous vous proposons une approche ludique, de la notion de communauté, au travers d'un clip de musique de la chanteuse Anna Kendrick (Cupsong). Nous détestons les approches scolaires pour améliorer l'engagement spirituel des chrétiens. Il faut, il faut... À l'école, comme à l'église, il faut toujours avoir la meilleure note, rester concentré. La détente, c'est pour la «récréation», pour l'après-culte.
Comment procéder?
Avant la projection du clip et la prédication, organisez des mini-groupes d'échange.
Demandez que les discussions et les échanges se concentrent sur l'exploration du vocabulaire proposé pour définir un culte. Il n'est pas nécessaire que les personnes traitent l'ensemble des mots. Peut-être ceux qui les intéressent le plus.
1. Préparation et mise en route
2. But du culte
3. Rythme
4. Animation
5. Bonheur et joie
6. Créativité
7. Résultat d'un culte
8. Rôle du pasteur et des accompagnants
Si vous avez la possibilité, récoltez quelques réponses. Circulez dans les groupes et notez des réactions pour les reprendre dans votre message. Ou bien mandatez un groupe «d'investigateurs» pour récupérer les réactions.
Projetez le clip en indiquant que ce qui se passe dans ce restaurant ressemble en fait à une activité d'un groupe de personnes réunies dans un but bien précis.
Demandez que les personnes présentes comparent leurs réponses à la réalité exprimée dans ce clip.
Quelques pistes pour exploiter ce clip en prédication
Le texte biblique proposé est le suivant: Actes des Apôtres 2:42-47
Vous remarquerez que nous ne proposons pas l'explication d'un texte, mais son utilisation en contrepoint, comme référence. C'est une des premières mentions d'un rassemblement de chrétiens, sous forme de culte. Sa plus simple expression de type liturgique.
Si nous reprenons les différents mots de vocabulaire voici nos pistes de réflexions:
1. Préparation et mise en route
Toute activité cultuelle commence dans la cuisine. Celui du pasteur et de ses accompagnants. La chanteuse regarde son public dans la salle du restaurant à partir de sa cuisine (pour le pasteur à partir de son bureau) et elle élabore une idée à partir de cette «vision». Quelle est ta vision des besoins de votre public?
Pour le public, pourquoi vient-il au restaurant? Pour enrichir le restaurateur? Parce que c'est la coutume? Parce qu'il s'ennuie à la maison? Il vient peut-être pour voir des copains. Pour simplement se restaurer, parce qu'il a faim. Lui aussi, il doit se questionner pour savoir pourquoi il vient au culte. Il a besoin de se préparer comme la personne dans la cuisine.
2. But du culte
Si le pasteur pense que le culte c'est juste pour se restaurer spirituellement, il est comme ce restaurateur qui se contente de faire de la bonne cuisine, mais qui ne s'occupe pas du confort de ses clients, de l'éclairage, de l'ambiance, de la mise en valeur de la table où il accueille ses invités. Avec le miracle de la multiplication des pains, le Christ s'est d'abord occupé des besoins réels de ses «followers» avant de prêcher la Bonne Nouvelle. De plus, le pasteur impose souvent son menu à lui qu'il croit le plus succulent, sans tenir compte des goûts et des souhaits de ses «clients». À l'église on ne fait pas de la gastronomie, mais en fait ça ressemble plus à une cantine scolaire ou militaire. Encore que les cantines scolaires ont bien évolué.
3. Rythme
Ce qui m'inspire dans ce clip, c'est que la chanteuse invente un rythme qu'elle transmet à sa «clientèle». La vie avec le Christ , c'est avant tout un rythme de vie. Un art de vivre, une manière d'exister. Une manière de célébrer la vie avec la famille, les copains. Dans la joie de vivre. Bien sûr, il n'y a pas seulement des circonstances de bonheur, il y a aussi le malheur à partager et à vivre. C'est un rythme d'ensemble et pour faire communauté, il faut souvent s'adapter au rythme de l'autre.
4. Animation
La Bible utilise souvent l'image du repas pour faire «communion». Dans nos cultes classiques on mange souvent spirituellement parlant, en silence. Ce n'est même pas le silence méditatif, mais juste faire silence pour écouter le «maître d'école».
5. Bonheur et joie
Sait-on créer le bonheur d'être ensemble, comme dans le clip ou met-on l'accent sur le bonheur d'avoir compris intellectuellement quelque chose?
6. Créativité
Avez-vous remarqué que même si la chanteuse donne un modèle d'animation, il y des groupes qui l'appliquent différemment, tout en restant dans le rythme et dans l'esprit de l'activité. Les enfants sont créatifs à l'école du dimanche et lorsque ils viennent au culte pour adultes, on leur demande de «penser» Dieu et la spiritualité. D'où aussi leur désintérêt pour s'intégrer dans la communauté adulte.
7. Résultat du culte
Le premier résultat c'est l'ambiance qui est générée. C'est tout un art de créer de l'ambiance spirituelle. Dans nos cultes, on parle de joie, mais on la voit rarement sur les visages et au travers de la gestuelle. Je parle surtout des communautés classiques issues des réveils du 19ème siècle ou de la mouvance réformée. Créer une ambiance spirituelle ne veut pas dire copier les concerts laïcs, mais ça ne veut non plus dire, se contenter de ne rien montrer de sa joie et de sa satisfaction.
Un autre résultat, c'est l'apprentissage d'une gestuelle commune. En ecclésiologie on appelle ça la «liturgie». Maintenant, imaginez que dans ce restaurant, on répète chaque fois qu'on s'y rend les mêmes gestes, le même rythme, la même expression. À la fin l'activité devient monotone. On s'ennuie. À moins de «sacraliser» le rituel. De lui donner un contenu sacré, comme l'Eucharistie chez les catholiques. Nous «sacralisons» facilement nos sainte-cènes, mais au travers d'un discours pseudo-spirituel.
8. Le rôle de l'animateur ou de l'animatrice
Il est essentiel. Ici dans ce clip, celle qui entraîne c'est la chanteuse, mais elle ne se pose pas devant son public, comme une cheffe d'orchestre. Elle s'immerge dans son public. Elle lance le processus et s'y incorpore. Là aussi c'est tout un art. Dans un culte, ce rôle de «meneur» ou «meneuse» peut être assumé par toute une équipe. La chanteuse est attentive à ce qui se passe et elle s'adapte à son public. Elle n'attend pas que le public s'adapte à elle. Un culte réussi, c'est que quand les animateurs partent par la petite porte et non sous les applaudissements, en laissant derrière eux la joie d'un groupe de personnes qui a eu du plaisir à célébrer leur Dieu.
Quelques mots au sujet du mot «ludique»
Vous aurez remarqué que pour nous le mot ludique, ne veut pas forcément dire, être superficiel, faire de l'humour, rire de l'existence, s'amuser. Pourquoi la spiritualité chrétienne a forcément besoin d'être sérieuse pour être efficace? Le torrent qui dévale la montagne, joue avec les dénivelées. Dans notre spiritualité évangélique, nous aimons canaliser, bétonner la spiritualité, diriger le cours des choses, y compris dans nos cultes. La création, deuxième Révélation (Romains 1:20) proposée par le Créateur, s'appréhende par le plaisir de la vue, par des émotions, avant une réflexion scientifique et académique. Pourquoi ne pas s'en inspirer pour le culte?