La Bible monument spirituel ou guide pour la vie?
Le pasteur protestant, moins les évangéliques, car ils sont arrivés plus tard dans l'Histoire, ont souvent transformé la Bible en monument, au vrai sens du terme, par le truchement de la chaire. Une sorte de «cathédrale» comme la chaire ci-dessous, de l'église protestante Saint Pierre le Jeune à Strasbourg.
La centralité de la prédication
Les réformateurs protestants ont mis, principalement, l'accent sur la Bible, comme pôle central de leur spiritualité, d'où la place que prend celle-ci avec la prédication. Les évangéliques reprennent parfaitement ce concept liturgique, tout en laissant la musique, la louange chantée, jouer le rôle de l'accompagnant émotionnel. L'espace liturgique se divise en fait, entre la chaire et les instruments de musique. Ah, j'oubliais l'écran de projection qui devient parfois un support visuel secondaire pour la prédication. Très peu, le support principal et exclusif. L'autel, sous la chaire à l'image, en relation avec la liturgie, ressemble plus à une table de camping spirituel. C'est là, une grande différence avec les catholiques qui mixent le travail avec la Bible, avec des activités comme les chemins le pèlerinage, les gestes liturgiques comme le signer de croix, la confession, la prise de l'hostie, la bénédiction par imposition des mains, l'eau bénite, etc... On comprend pourquoi les réformateurs protestants, qui n'y voyaient, à la fin du Moyen-Âge, qu'une dégénérescence, réduisent l'accès à la spiritualité, que par le texte sacré, lu, expliqué, commenté… en chaire, bien sûr et pratiqué.
La Bible elle-même, en prédication, ressemble à ce monument en pierre: mastoc, exclusive, imposante, incontournable. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas voulu dire: la Bible reste centrale pour le chrétien, sauf qu'on l'a tellement «taillé dans la pierre», dans le moule scolaire et explicatif, qu'elle ne reste souvent qu'un «monument» spirituel.
De plus et cette chaire monumentale de Strasbourg le montre bien, même si les Calvin, Luther, Zwingli et Bucer le réformateur de la capitale alsacienne prônaient le sacerdoce universel, ne montait en chaire qu'un pasteur (homme) diplômé et consacré. On peut aisément s'imaginer que cette chaire revêt la même importance que pour le standupper qui se produit dans un Zenith.
Toute pratique liturgique s'érode. Aujourd'hui encore plus que hier à cause de l'accélération numérique. La prédication a de moins en moins d'impact, mais la spiritualité réformée et évangélique s'inspirent, pour se ressourcer, de plus en plus de celle du Moyen-Âge. Les pèlerinages, les gestes liturgiques s'appellent au 21ème siècle, festival, concert de louange, déhanchements au son de la musique voir danse, production de clips, commentaires sur les réseaux sociaux, partages d'opinion, participation à des évènements œcuméniques, des marches pour Jésus qui ressemblent aux processions du Moyen-Âge. Comment le culte et la prédication ne devrait-elle pas descendre de son «piédestal de pierre»?
Le prédicateur de la culture numérique ne peut pas faire abstraction de l'influence de la culture numérique et des réseaux. Je termine par un conseil tout à fait pratique de la part d'une sémiologue qui s'exprime en vidéo: l'importance des mains dans la communication. Souvent le prédicateur, surtout, s'il est petit disparaît derrière la chaire. On ne voit que le haut du corps et sa tête. Bien sûr, le prédicateur classique diffuse, avant tout sa pensée sur le texte biblique. Le travail avec le corps tout entier et plus spécialement avec les mains est très secondaire. Pas pour le «pèlerin-festivalier». Ce qui va se passer, c'est comme au Moyen-Âge, il y aura une inversion de comportements. La prédication sera larguée au profit de l'expérience du «festivalier-pèlerin». On en a marre de presque quatre siècles d'explications de la Bible en «chaire». On veut vivre la spiritualité avec ses tripes, ses émotions. Du temps de Calvin, les gens avaient marre de devoir marcher, allumer des cierges, se traîner à genoux pour faire pénitence. Le réformateur genevois prêchait en disant: asseyez-vous sur les bancs, croiser vos bras, restez tranquilles et écoutez-moi prêcher. Ils trouvaient cette manière de faire bien reposante, sauf qu'au bout de quatre siècles on voudrait sortir de ce repos. Les nouveaux chrétiens veulent vivre leur foi avec ferveur. Ils souhaitent la vivre non avec les «pères», mais avec ferveur avec leurs «pairs». Comme l'écrit aussi Aymeric Christensen, le rédac en chef de La Vie* dans son éditorial en relation avec les JMJ de Lisbonne: ce qu'ils cherchent..., c'est un temps festif, une expérience fondatrice dans leur relation au Christ, quasiment un rite de passage.
*La Vie N° 4066.
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