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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

La théologie: architecture ou jardin? (Deuxième partie)

19 Janvier 2023, 09:10am

Publié par Henri Bacher

Dans cette deuxième partie nous faisons référence au jardin. Comment développer une nouvelle théologie en se basant sur la structure d'un jardin? Contrairement au précédent article où nous faisions référence à une maison pour expliquer comment fonctionnait la théologie depuis la Renaissance.

La théologie: architecture ou jardin? (Deuxième partie)

Les différences entre «maison» et «jardin»
Dans une maison l'architecte définit en premier les volumes, indépendamment de comment il va meubler ces volumes. Il prépare des sortes de cases à remplir qu'il va relier avec des escaliers, des ascenseurs, des couloirs. Dans la théologie issue de la Renaissance, ces volumes s'appellent «théologie systématique», «théologie analytique», «théologie de l'Ancien Testament», «théologie du Nouveau Testament» «théologie du Saint Esprit», «théologie de la prospérité», «théologie de la fin des temps», etc... Il y a des théologiens spécialistes pour chaque volume, mais on a beaucoup de peine à relier ces volumes. Le pire, c'est qu'il y a des communautés qui se forment sur la base d'un volume, sans tenir compte des autres parties de la maison spirituelle.

C'est un drame lorsqu'on utilise la manière de penser de l'école qui commence par décortiquer la réalité avant d'en reconstruire une nouvelle, comme pour la phrase où l'on commence par le mot. Le problème c'est qu'une majorité de personnes ne savent plus assembler les mots correctement, ils deviennent des illettrés fonctionnels. Et ils ne comprennent plus le sens de la phrase, le sens de ce bâtiment spirituel qui valorise les «volumes» au lieu de comprendre le vécu commun dans une maison.

Ce qui est important à noter, c'est que dans une telle maison, il faut être assis pour penser la réalité, pour apprendre. Le théologien issu de la Renaissance est quelqu'un qui est «assis» à un bureau, l'étudiant est assis pour écouter, écrire et penser. On ne peut écrire correctement qu'en étant assis, c'est difficile d'écrire en marchant. Or la spiritualité du Moyen-Âge ce sont des personnes debout dans l'église pour écouter le prêtre, ils circulent même dans la nef. Avec la procession on marche, le chemin de Compostelle se fait à pied, pas en premier dans la pensée. Jésus c'était quelqu'un qui passait son temps à marcher et le modèle qu'il donne c'est le chemin. Nous sommes devenus des «penseurs» du chemin et très peu des «sportifs» du chemin. Les «marcheurs» du Moyen-Âge ont transformé la spiritualité en mécanique-qui-ressemble-à-une-marche-spirituelle, comme les théologiens réformés et maintenant évangéliques ont transformé la spiritualité dans des concepts statiques qui ne «marchent» plus aujourd'hui. Pourtant, cette spiritualité du Moyen-Âge, en mouvement, m'inspire pour promouvoir celle du jardin. 

L'avantage d'utiliser la symbolique du jardin, c'est qu'elle va aussi fonctionner comme grille de lecture au même titre que la maison. Avec ses avantages, mais aussi avec un certain potentiel de déformation.

Le monde socio-culturel d'aujourd'hui s'intéresse davantage à tout ce qui touche à la nature, à l'écologie, au climat, donc il est logique de repenser la théologie dans ce contexte favorable. La grande différence avec la maison, c'est bien qu'on peut y aménager des espaces de repos, de détente, où l'on s'assoit sous une ombrelle, c'est un univers en mouvement: on y marche, on y cultive, on y plante, on sélectionne les plantes, les semences, on creuse, même si un jardin peut aussi se prêter à la méditation, la position en silence, avec seulement un mouvement intérieur, lié à la pensée.

Les éléments essentiels dans le jardin
Le premier est l'eau (l'émotion) et celle-ci ne peut être canalisée que pour les arrivées et éventuellement l'arrosage automatique. Le soleil (l'amour divin) est le deuxième et puis il y a les semences ou les plantes qui sont de purs produits de la Création. La terre est également essentielle, puisqu'elle contient les composants nutritifs. La composition du jardin, son architecture, car elle utilise aussi des volumes, la manière de cultiver, de combiner des plantes utilisent la créativité, la persévérance et le génie humain. Le jardin ne se nourrit pas en premier d'un livre, comme pour le théologien de la maison, mais de la Création (Romains 1:20). 

Peut-on utiliser la Bible pour créer un jardin?
That's the question! Pas si nous l'utilisons comme le théologien de la maison. Même s'il y a, dans la Bible, beaucoup de références au jardin comme les deux monuments, celui du jardin d'Eden et celui du Jardin de 
Gethsémané. Ce n'est pas un livre que le jardinier va emmener pour savoir comment sélectionner ses plantes, à quelle époque les planter, comment les croiser, etc... On ne peut s'en sortir qu'en associant la Bible, le texte écrit, à la Création comme nous le proposons avec le théomimétisme. Le jardin ne peut pas nous enseigner la manière d'être sauvé, mais le théologien de la maison s'est tellement comporté avec son texte en standalone qu'il a cru qu'il pouvait tout expliquer à partir du texte sacré.

Les différents jardins
O Le jardin d'agrément. C'est celui qui est actuellement probablement celui qui va se promouvoir le plus facilement, grâce à la culture des loisirs, de la musique, des images.
O Le jardin potager. Celui qui nourrit, spirituellement parlant. Dans la maison, c'était le rôle de la prédication et des études bibliques. Comment développer une nouvelle «cuisine» qui sait utiliser et mettre en valeur les produits du jardin? C'est aussi l'espace qui va servir à nourrir les pauvres et les nécessiteux, les migrants, les SDF.
O Le jardin secret. Il a aussi son rôle à jouer dans le monde des réseaux sociaux qui nous apprend à passer notre vie à la fenêtre.
O Le jardin d'acclimatation. Notre monde est tellement bouleversé par les flux migratoires, les brassages de population, l'adaptation continuelle à de nouvelles techniques, de nouvelles théologies, comme celle que nous proposons, de nouvelles manières de vivre le couple, d'éduquer nos enfants, etc... Comment développer dans la communauté chrétienne l'acclimatation qui n'est pas la dissolution dans le magma général.
O Le jardin d'enfants. La démographie est galopante, surtout hors monde occidental, mais dans bien d'autres parties du monde.

O Les jardins familiaux. Une nouvelle manière de vivre des communautés d'intérêts.
O Le jardin botanique. Destiné à la conservation. C'est important de préserver des théologies, des pratiques spirituelles, qui peuvent servir à la création de nouvelles espèces de plantes.

Quel est le modèle que la Bible offre pour l'éternité?
Ce n'est ni une maison de maître, habitée par d'éminents penseurs, ni un jardin, comme celui d'Eden, mais une ville (Apocalypse 3:11-13), avec beaucoup de maisons et des jardins suspendus, comme ceux de Babylone.

La théologie: architecture ou jardin? (Deuxième partie)

Est-ce que Dieu le juge se trouve aussi dans ce jardin?
Bien sûr, c'est le juge qui a aussi aménagé un jardin. Ne refaisons pas la même faute d'appréciation qu'on a faite, avec la théologie de la «maison», en interprétant la Bible uniquement à partir des «volumes» de celle-ci. L'histoire du jardin d'Eden nous donne une clé intéressante, Dieu s'y promenait incognito et il vit incognito dans le monde par son Esprit-qui-plane-au-dessus-des-eaux (Genèse 1:2). Cette interprétation paraît un peu tirée par les cheveux, mais l'eau est essentielle dans le jardin et pour nous la théologie du jardin est très fortement l'image du règne du Saint Esprit, dans ce nouveau développement culturel lié à l'émotion. Reste la question du Fils de Dieu, qui fait aussi partie de la Trinité. Quel rôle va-t-il jouer dans cette configuration «maison-jardin»? C'est ce que nous allons aborder dans le dernier volet de cette trilogie théologique.


Suite vers la troisième partie:
La Trinité comme guide de synthèse

Retour vers la première partie
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