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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Théologie de l'enclos contre théologie du parcours

21 Juillet 2022, 08:00am

Publié par Henri Bacher

Théologie de l'enclos contre théologie du parcours

La parabole du bon berger (Jean 10) est devenue au fil des siècles une grille de lecture pour la réalité communautaire. Ce texte n'a pas seulement été utilisé comme tremplin pour appréhender un tant soi peu le rôle du Christ, mais il a servi de formatage à la communauté chrétienne. Or, les paraboles ne peuvent pas être utilisées au même titre que, par exemple, les textes de l'apôtre Paul. Bien sûr, ces versets, de la parabole, nous ont rendu énormément service pour cadrer les croyants et les «enfermer» dans nos doctrines comme dans un enclos. Pour contrebalancer, nous proposons d'y associer le parcours, hors du «cadrage», pour nous donner un nouvel élan pour vivre une certaine liberté sous la conduite toujours du même berger.

L'enclos

Nous l'avons surdimensionné dans notre conception de la communauté. Alors qu'il est surtout utilisé pour la nuit pour sécuriser le troupeau face aux prédateurs ou lors de la saison hivernale. Le troupeau, comme sur le clip relatant la migration de celui-ci vers l'alpage, doit sortir et vivre dans le monde et se coltiner à celui-ci.

Cette théologie a été largement favorisée par l'école républicaine, un puissant modèle pour l'église, qui demande de «s'enfermer» dans une salle de classe pour pouvoir apprendre correctement. C'était aussi plus facile pour les pasteurs et les prêtres d'enseigner un public «captif».  

Plus largement, l'enclos a aussi influencé la manière de penser l'évangélisation. Même si Jésus se présente comme la porte de l'enclos, il n'enseigne pas que cette porte est un passage codifié, «doctrinisé» pour être sauvé. Les quatre lois spirituelles utilisées, par le passé, pour transmettre la foi, commencent par un constat «noir/blanc». Tu es pécheur, tu es condamné. Tu es en dehors de l'enclos. Lorsque Jésus a appelé ses premiers disciples, il ne leur a pas mis le couteau du juge sous la gorge, mais il leur a dit, «viens voir», «suis-moi», tu apprendras à entrer et à sortir de l'enclos.

C'est vrai la conversion amène forcément le pas-encore-chrétien dans l'enclos protecteur et il faut qu'il s'adapte aux rituels de cet espace fermé, mais le pire, c'est que beaucoup de chrétiens sont très contents de leur communauté fermée. On les nourrit, on s'occupe d'eux, tout le monde dans l'enclos pense comme eux. Ils se sentent sauvés parce qu'ils sont dans l'enclos à l'intérieur et le monde maléfique est forcément dehors.

Le grand problème c'est que les gens à l'extérieur ne voient qu'un enclos rempli de croyants et comme ils ne vivent pas avec eux, ils ne se rendent pas compte de la dynamique de ce corps spirituel. Parce que malgré ma description caricaturale de l'enclos, on y rencontre la vie christique, reflet de l'au-delà.

Le parcours

Le Christ a emmené ses disciples par monts et par vaux, il leur a enseigné le Royaume en marchant, en festoyant lors d'un mariage, en se promenant dans les cimetières pour ressusciter un mort ou chasser les démons d'un fou. L'apôtre Paul a également voyagé sur le bord de la Méditerranée, avec des collègues. Il n'a pas monté une école (un enclos) à Jérusalem.

Le parcours est en complément à l'enclos. Il ne s'agit pas de privilégier le parcours à l'enclos, mais de les faire fonctionner en systémique. L'hiver c'est important de se retrouver dans l'enclos. De même si l'on se trouve dans une région infestée de «prédateurs». 

Le parcours c'est une respiration, le bonheur de se retrouver à l'alpage. C'est plus une question de mentalité que d'activités.

Le troupeau apprend différemment que dans l'enclos. Observez sur le clip vidéo comme le troupeau s'adapte à la configuration géographique, aux routes, aux obstacles. Il reste uni, mais vous vous rendez aussi compte que pour gérer un tel troupeau, il faut des chiens qui sont superflus dans l'enclos. Le travail du berger n'est pas de tout repos et il lui faut une sacrée expérience pour faire migrer son troupeau. C'est plus facile de travailler dans un enclos!

Ce qui est intéressant c'est que le public extérieur au troupeau le voit évoluer en «communauté». Il va admirer la dextérité du berger à le mener à l'alpage, mais il va aussi avoir du respect pour ces moutons qui se comportent d'une manière harmonieuse et obéissante. Il va peut-être se joindre au flot et apprendre à suivre le berger. 

Comment appliquer cette parabole de l'enclos et du parcours?

Nous vous rappelons que la définition de la communauté chrétienne indique que là ou deux ou trois chrétiens sont rassemblés, le Christ est au milieu d'eux (Matthieu 18:20). Donc, il n'est pas forcément nécessaire de déplacer toute la communauté dans son ensemble, mais il faut encourager des couples, des familles, des groupes de quelques personnes à entamer le voyage vers «l'alpage». C'est en fait un va et vient de l'enclos vers l'alpage.

Ce qui permet aussi que les fidèles qui préfèrent rester dans l'enclos au lieu de se coltiner le monde extérieur hostile d'y rester, mais ceux qui étouffent à l'intérieur de sortir.

Personnellement, j'ai expérimenté une formation sur le thème de l'argent en descendant à pied, avec un groupe, d'une montagne, tout en marchant. Ça permettait de discuter, d'échanger, de s'assoir pour donner un enseignement.

L'engagement dans un travail humanitaire de courte durée est un autre exemple. Monter une comédie musicale permet également de sortir de l'enclos ou bien participer à la fête de la musique en juin est une autre possibilité, il n'y a pas de limites aux talents et à la créativité.

Théologie de l'enclos contre théologie du parcours

Je ne résiste pas de vous transmettre le lien sur un berger qui lit le psaume 23. Même si techniquement, puisqu'il a été tourné il y a une vingtaine d'années, l'audio du clip, n'est pas top. Ce berger, malgré son grand âge aujourd'hui, fait toujours encore partie d'une communauté évangélique de la FREE

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