Esquisse d'une théologie pour penser, pratiquer, formuler la foi dans la culture numérique.

20 Octobre 2022, 08:00am

Publié par Henri et Martine Bacher

Auto-interview des créateurs du nouveau blog explorant la théologie intuitive.

Esquisse d'une théologie pour penser, pratiquer, formuler la foi dans la culture numérique.

O Vous venez de lancer un nouveau blog où vous proposez de revisiter la théologie à partir de la culture de l'oralité électronique et de la Révélation de la Création, selon Romains 1:20. Pourquoi?

Martine: Pendant une douzaine d'années nous avons travaillé en Suisse Romande et au Pérou dans un ministère parmi les moins de 15 ans. J'ai beaucoup illustré et dessiné des clips d'histoires de la Bible pour les enfants, dont vous trouverez nos réalisations sur la chaîne Bibletubeenfant. Nous avons dû apprendre à contextualiser et à transcrire le message biblique pour ces âges-là en montant, par exemple, des spectacles de marionnettes. Nous avons aussi transformé un vieux car postal suisse en salle de spectacle ambulante. Déjà à notre époque, dans les années soixante-dix, il ne suffisait pas de prêcher avec un discours adapté aux enfants. Il fallait trouver d'autres moyens pour retenir leur attention. Avec la visualisation, le jeu, avec des activités créatives. Pourquoi, souvent ces ados et ces enfants n'ont-ils pas continué leur parcours spirituel dans leur communauté adulte, alors que déjà, à l'époque, on correspondait à la culture de cette jeunesse?

Henri: En intégrant cette jeunesse, après la fameuse école du dimanche, dans le circuit adulte, où l'analyse du texte biblique, la prédication très intellectuelle, les études bibliques souvent scolaires étaient prépondérantes, on les a coupé de leur culture d'origine dédiée au visuel, à l'émotionnel, au jeu. Et on les a perdus. Certains sont restés par loyauté à leurs familles et d'autres ont quitté la communauté en étant adultes, parce qu'ils n'arrivaient plus à concilier leur expérience spirituelle en tant qu'enfant avec le monde « froid » des adultes.

Le problème et l'église ne s'est pas vraiment rendu compte, c'est que cette culture que nous pratiquions avec les enfants est devenue dominante parmi les adultes. L'école républicaine passe d'une réforme à une autre pour intéresser les enfants. L'oralité électronique phagocyte la culture de l'école et par ricochet toute notre théologie issue de l'univers de l'écrit, de la lecture, soutenus par l'imprimerie et le système scolaire classique. Les gens ne nous comprennent plus.

O Comment pouvez-vous prétendre développer une nouvelle théologie que vous appelez «intuitive», sans avoir, pour Henri, le bac, sésame important pour être reconnu, un tant soit peu, dans le monde dédié à la connaissance?

Henri: Hélas, c'est bien vrai. Je n'ai pas le niveau-requis-pour-formuler-une-nouvelle-théologie. Heureusement que ma femme, professeure des écoles corrige tous mes textes!

Martine: Nous avons acquis notre manière de penser Dieu au contact de personnes avec qui nous avons travaillé et qui étaient des modèles pour nous. Mais nous avons aussi été confrontés à des cultures différentes, comme celle sud-américaine au Pérou et moi, comme enseignante scolaire au Laos. Nous avons appris à jongler avec des cultures qui nous ont chaque fois obligés à repenser notre spiritualité. Et ça continue aujourd'hui. Sommes-nous, dans nos théologies, dans la réalité du monde, ou simplement encore sur les bancs de l'école, qui ne sont plus le noyau propulseur de la culture?

Henri: Nous pensons que la théologie formulée par les réformateurs, c'est comme un matériel théologique qui a été formaté, conceptualisé, en fonction d'un récipient, celui de la culture de l'écrit et de la lecture. Selon le récipient, on ne peut pas y mettre n'importe quoi, ni n'importe comment. Si vous utilisez une boîte de carton pour transporter un produit, il faut qu'il soit dur et non liquide. Or, aujourd'hui, la culture passe du « solide » au « liquide », à l'émotionnel. Nos concitoyens utilisent de plus en plus un contenant (un lecteur électronique) destiné au « liquide ». Leurs smartphones ont de la peine à rendre compréhensible et visible l'approche analytique et systématique. Donc, c'est simple, il faut repenser la théologie pour la rendre « liquide », tout en sachant qu'il reste toujours des consommateurs qui préfèrent se faire livrer en « carton ». Sauf, qu'ils diminuent à vue d'œil et que le livre, le contenant le mieux adapté pour la théologie calviniste, se fait de plus en plus rare. Avec ces images de carton, nous essayons de « parler » « liquide ». C'est une manière que le Christ savait manier à la perfection, avec les paraboles.

La Bible, comme livre reste bien essentiel pour connaître le salut. Elle restera le point de référence pour contrôler n'importe quelle approche théologique. Un peu (beaucoup) comme les étiquettes sur la bouteille d'un médicament qui donne la composition du liquide, son usage, sa posologie et les avertissements d'usage.

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