Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Jusqu'où peut-on aller dans l'adaptation culturelle?

3 Février 2022, 09:00am

Publié par Henri Bacher

Jusqu'où peut-on aller dans l'adaptation culturelle?

Craig Duke est-il un pasteur émergent, adapté à la culture actuelle ou simplement une personne qui comprend mal l'adaptation culturelle? J'opte pour cette dernière interprétation pour son geste certes courageux, mais aussi imbécile.

Un geste irréfléchi culturellement parlant?

En faisant écho à un article diffusé par le quotidien « Le Matin », le 9 décembre 2021, je pose cette question des limites de l'adaptation culturelle. Ce pasteur méthodiste américain, responsable d'une communauté près d'Evansville (État de l'Indiana) a voulu bien faire en participant à l'émission « We're here » de la chaîne de télé HBO. Il justifiait d'ailleurs son geste en disant que « dans un ministère religieux, si vous voulez impliquer des gens différents de vous, il faut aller à leur rencontre. L'invitation de cette émission me l'a permis ». Il s'est donc déguisé en drag-queen pour montrer comment il pouvait s'adapter à son auditoire. Ce n'est pas une fake-news. Il l'a fait! Résultat de l'opération: il s'est fait interdire l'exercice de son ministère pastoral par sa fédération d'églises. Comme d'habitude, c'est un peu la grande tendance actuellement grâce aux réseaux sociaux, il a eu beaucoup de partisans et beaucoup d'opposants. Fallait-il lui interdire le ministère? Je pense que c'est aller trop loin, même si je ne connais pas le contexte. C'est peut-être sa énième frasque qui a fait déborder le vase. Comme nous sommes entre deux cultures, c'est normal de se louper, sinon on n'avancera jamais. Certains chercheurs ont fait exploser leur laboratoire avant de découvrir la bonne formule.  Néanmoins, j'aimerais en tirer quelques enseignements quant aux limites de l'adaptation.

Des exemples historiques

Lorsque les premiers missionnaires blancs se sont installés parmi des tribus qui se promenaient, femmes et hommes, moitiés à poil, seins nus et organe sexuel masculin protégé par un tube de bambou, ils ne se sont pas dévêtus pour annoncer l'évangile sous prétexte de rejoindre leur public. Par contre le missionnaire Hudson Taylor, s'est habillé à la chinoise pour évangéliser les chinois. Il portait même, en tant qu'homme, la fameuse petite natte, sur l'arrière du crâne. Il y a donc une première difficulté pour le missionnaire, c'est de choisir l'adaptation selon son public-cible, encore que pour le missionnaire blanc dans une tribu « nudiste », je comprends que le problème d'adaptation était différent de celui de Monsieur Hudson.

Ne pas confondre communication et évangélisation

Mon analyse de l'action du pasteur Craig Duke, c'est qu'il a confondu communication et évangélisation. Il a fait un coup d'éclat en croyant que les gens allaient mieux accepter l'évangile du Christ. Il a parfaitement utilisé les codes de communication de la culture numérique. Ça s'appelle en langage vulgaire « mettre son cul à la fenêtre ». C'est bien le problème de certaines communautés chrétiennes. Pour se produire en scène, derrière ou devant leur chaire, ils habillent leurs cérémonies cultuelles d'ambiance dans le style night-club, avec projection lumineuse, fond sonore, prédicateurs et prédicatrices paramétrés, physiquement et culturellement. Je ne fais pas de critiques, c'est une manière de s'habiller culturellement à la Hudson Taylor. Mais ce n'est pas ça qui va convaincre en premier le pas-encore-chrétien. C'est important de casser l'image culturelle qui fait écran avec ce qu'il y a à l'intérieur de nos personnes: l'amour du Christ pour notre prochain. L'autre problème de notre pasteur méthodiste, c'est qu'il a choisi de montrer une image (celui de la drag-queen) qui ne concerne qu'une stricte minorité de la population. On va admirer son culot en tant que pasteur, c'est d'ailleurs le carburant des réseaux sociaux, mais de là à faciliter la conversion d'une personne, c'est une autre histoire. Le Christ n'a jamais cherché à convaincre par le culot et les provocations socioculturelles. Son truc à lui c'était les guérisons, les résurrections, les pardons, les délivrances. Il est toujours plus facile de produire un évènement lié à la culture comme la musique, les arts plastiques, des films que de prier pour la guérison d'une personne et surtout de permettre que le miracle se produise, simplement parce que nous avons mis en route notre foi. Nous, on a tendance à déplacer des montagnes dans le domaine de la communication, dans la « manière de s'habiller  » à la Hudson Taylor.

Matthieu 21:21-22
Jésus leur répondit: «Je vous le déclare, c'est la vérité: si vous avez de la foi et si vous ne doutez pas, non seulement vous pourrez faire ce que j'ai fait à ce figuier, mais vous pourrez même dire à cette colline: “Ote-toi de là et jette-toi dans la mer”, et cela arrivera. Si vous croyez, vous recevrez tout ce que vous demanderez dans la prière.

Qu'attendent les gens du chrétien?

Ils veulent avant tout voir, non pas notre habit culturel, mais l'amour du prochain, la compassion pour les autres, la joie de vivre, même dans nos circonstances difficiles, la capacité de surmonter la souffrance, bref: notre foi. Le problème, c'est que le numérique, comme auparavant le livre peut parler de la foi, mais ils ne peuvent montrer la réalité. C'est pourquoi le meilleur moyen pour convaincre, c'est de fréquenter les gens dans leur réalité physique, pas dans leur réalité numérique.

Que tu sois en costume cravate ou en bikini ou en jeans troués peaufine avant tout ta foi et non ton look. Et puis, laisse tomber le monde qui te fait faire le guignol dans une émission. Ils n'ont aucun intérêt à faire progresser la foi. Ils veulent se faire du fric sur ton dos! C'est peut-être aussi ça que notre cher pasteur Graig n'a pas compris.

Jusqu'où peut-on aller dans l'adaptation culturelle?
Commenter cet article
M
Merci Henri pour cet article qui fait réfléchir sur nos habitudes culturelles et cultuelles ! Un bon raisonnement, je trouve !
Répondre