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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Une église esthétique ou une église remplie de bonté?

8 Mai 2014, 15:52pm

Publié par Henri Bacher

Nous avons l’habitude de nous regarder dans le miroir, de faire attention à l’habillement, d’embellir notre existence. Ainsi, nos activités ecclésiastiques ont tendance à se relooker pour nous rendre attractifs au monde. Est-ce une bonne chose?

Des cathédrales musicales, artistiques, virtuelles?
La beauté, ou plutôt l'esthétique, joue un rôle primordial dans notre culture. Une génération complète n'a plus connu de guerres sur ses propres terres. L'occident est riche, même si le seuil de pauvreté s'est élevé pour bon nombre de personnes, mais rien de comparable avec la pauvreté de l'hémisphère sud. Nous brassons beaucoup d'argent, pour accompagner nos existences d’ambiances musicales, pour mettre en valeur nos édifices, nos musées, nos routes, même campagnardes, pour habiller nos femmes et nos enfants, pour manger non plus seulement à notre faim, mais pour "designer" notre nourriture. Nous courons d'une fête à l'autre. L'église est inévitablement prise dans ce tourbillon dédié à l'embellissement de nos existences et les dépenses pour la musique, les lieux de rencontre, les événements peuvent se compter par millions, au bas mot. Nous secouons la tête en voyant les dépenses occasionnées par la construction des cathédrales au Moyen-Âge, mais ne construisons-nous pas des "cathédrales" aujourd'hui, musicales, artistiques, virtuelles?

Nos concerts de louange devraient rendre les gens “bons”, avant de les gaver de beauté.
Pourtant la beauté est une des composantes divines, il n'y a qu'à regarder la création! Pourquoi s'offusquer si des personnes veulent rendre la vie plus belle?

D'ailleurs, nous ne parlons de la création pratiquement que sous l'angle de la beauté. Nos cartes postales avec versets bibliques célèbrent surtout la beauté. C'est intéressant de noter que dans le processus de création, décrit dans les premiers chapitres de la Genèse, Dieu constate, après chaque phase de création, que c'est une bonne chose et non une chose belle: "Dieu vit que cela était bon". Nos réunions d’évangélisation ou nos concerts de louange devraient rendre les gens “bons”, avant de les gaver de beauté. On peut même aller plus loin. Les chrétiens jugent-ils une prestation selon le critère de la beauté ou selon le critère de la bonté?

L’un n’exclu pas l’autre. C’est comme lorsqu’on offre un cadeau. Si le contenu est aussi futile que l’emballage, qui se jette à la poubelle après usage, alors nous sommes mal partis.

Il n’y a pas seulement la beauté visuelle ou sonore, comme la décoration et l’éclairage d’une salle, la sonorité d’une chanson, mais la beauté se retrouve aussi dans les constructions intellectuelles. Une théologie peut être belle dans sa manière de la concevoir et de la structurer, mais est-elle “bonne” pour le croyant? Un discours peut avoir beaucoup d’élégance, mais sert-il à promouvoir la bonté parmi les hommes?

Travailler sur les bonnes questions
Mais attention, en tant qu’analytique, issu de la culture du livre, nous avons l’art de séparer les composants pour les évaluer. Ainsi, je sépare beauté et bonté. Il faudrait les considérer comme un ensemble. Un système qui fonctionne en symbiose. N’est-ce pas aussi un geste de bonté de la part de Dieu de nous offrir gratuitement un beau coucher de soleil, après une journée passée dans la “mine” de notre existence.

Reste que toute la Bible nous parle avant tout d’un Dieu créateur de bonté et non d’un Dieu créateur de beauté. La beauté doit faciliter l’émergence de la bonté. Et toute initiative dans l’église devrait commencer par la question suivante: est-ce ce que notre activité va être bonne pour le croyant comme pour le non-croyant? Souvent nous travaillons plus sur les questions d’esthétique que sur les bonnes questions.

Henri Bacher

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