Quel est votre profil de leader?
Par profil, j'entends surtout celui du pasteur. Dans la culture du passé, celle où le système scolaire formatait aussi la manière de diriger un groupe social comme la communauté chrétienne, on n'avait pas forcément besoin d'un leader de type charismatique. Je ne parle pas ici des charismes spirituels comme les dons de l'Esprit. On demandait surtout des responsables qu'ils sachent appliquer un programme et le faire vivre. Ils étaient considérés comme de bons enseignants, qui avaient certes d'excellentes capacités de transmettre un savoir, mais à qui on ne demandait pas forcément un leadership fort. La prédication, le catéchisme ou les études bibliques sont des programmes où le type de personnalité n'a pas une importance primordiale.
Le leader «fort» et le second
Le leader fort que les anglophones appellent un «natural strong leader», un leader naturellement fort, puissant, doué. Un peu comme dans l'image ci-dessous:
Ce beau chinois, grand et fort, a fait gagner son équipe, dans une compétition, lors d'une formation de groupes de responsables, parce que simplement, il pouvait se permettre de grandes enjambées et de plus il avait la niac du gagneur. Il avait des dispositions physiques et psychiques naturelles. Il avait le profil du leader. Et si on n'a pas ces dispositions que devient-on? Un simple second, un suiveur, un copieur qui remplit consciencieusement le rôle qu'on lui a demandé de jouer?
Le rôle du second
C'est bien en se comparant au «strong leader» qu'on se fait piéger. On fait tout pour lui ressembler. On gonfle ses «bicepts», on se comporte comme un leader qui a de l'autorité naturelle alors que le second n'a pas cet avantage et les personnes en face de nous se rendent bien compte qu'on n'est pas bien dans le rôle qu'on s'attribue ou que la communauté nous impose. Mais le second, s'il accepte et comprend que le profil que Dieu lui a attribué à la naissance pourra être aussi indispensable que celui du leader fort. Le potentiel de ce dernier et celui du second ne peut vraiment s'exprimer pleinement que dans la complémentarité. Chaque profil aura ses limites compensées par l'alliance entre les deux types de personnalité.
L'illustration choisie n'est peut-être pas la meilleure en ces temps troublés en Europe, où la guerre se pointe, mais la Bible parle aussi de combat, ne serait-ce qu'avec le fameux verset d'Éphésiens 6:17: Acceptez le salut comme casque et la parole de Dieu comme épée donnée par l'Esprit Saint.
Le leader fort a tendance à vouloir faire évoluer les choses en «martelant» son manche dépourvu de lame, sans la compétence du second. Il peut faire avancer les situations à coup de bâtons, à coup de semonces, à coup d'imposition de sa personnalité tout en puissance.
Le second de son côté va peut-être utiliser subtilement ses atouts. C'est un «ciseleur», un metteur en perspective. Il saura utiliser son instrument avec beaucoup de finesse, d'exactitude. Il sera efficace, mais pas au même titre que le «leader fort». S'il veut singer le leader fort, il perd sa raison d'être, celui de servir en contrepoint. Mais lui aussi sera plus efficace en association avec le «manche», le frappeur, celui qui n'a pas peur de prendre des décisions qui font mal.
Pourquoi le tandem leader fort et leader second a de la peine à fonctionner?
Entre autre parce que les deux ont tendance à fonctionner selon leur logique de personnalité. Le fort va demander et attendre d'un second qu'il donne des coups de lame à sa manière, violente, directe, cassante, déterminée et bien sûr, selon la manière de fonctionner qu'il a décidé. Le second, comme il va travailler plus en nuances rechignera à s'engager plus dans cette manière de travailler sous la houlette d'un plus-fort-que-lui.
Je parle avant tout de personnalité liée à l'humain et non liée à la culture. Le leadership fort n'est pas forcément lié à un niveau d'étude de type scolaire ou académique. Le second peut-être un docteur en théologie et le «strong leader» un artiste de la chanson, un showman, un créateur artistique.
Ce qui va être performant, c'est l'alliance du leader fort avec le leader second
Si le second se transforme en suiveur, en exécuteur de ce que le puissant aura décidé, le résultat ne sera pas le même que si le leader fort accepte d'amender sa pensée, son action, en fonction des propositions de son vis-à-vis. Il faut qu'ils arrivent à une création commune. Il faudra développer une forte relation de confiance. Il faudra aussi tenir compte des egos. Beaucoup de leaders forts et seconds fonctionnent à partir de leurs égos et c'est «tuant».
Notre conseil
Si vous êtes un leader fort, faites alliance avec un second mais qui ne fait pas partie de votre univers de pensée. Ne faites pas jouer les niveaux de compétences de type académique, mais faites confiance à un moins «diplômé» que vous, du point de vue scolaire, mais qui a de vrais talents. Le contraire est aussi vrai, le second ou le leader «artiste sans diplôme universitaire» devrait faire confiance à celui pétri de théologie déductive à la manière scolaire.
Chacun devra perdre des plumes, amender ses convictions et ses pratiques spirituelles.
Lorsque qu'un leader fort travaillant en complémentarité avec un second, transmet la direction d'une église, d'une association, il y a souvent des couacs. Généralement le fort va laisser sa place au second, parce qu'il a confiance que le second va continuer son travail. Or, le second n'a pas la personnalité de rentrer dans les habits du leader fort. Souvent les adhérents, les membres du personnel d'encadrement, sont désorientés parce qu'ils ne retrouvent plus la manière de procéder du leader fort et ça a tendance à capoter. Il y a parfois la figure d'un pasteur second qui a su travailler dans la finesse, mais qui n'a pas su trancher, d'une manière forte, dans les conflits existants. Dans ce cas, il faudrait peut-être envisager d'embaucher un leader fort, à condition de lui adjoindre un second.