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ÉGLISE. CULTURE. NUMÉRIQUE.

Personne source ou comment garder une église qui prospère

16 Juin 2014, 12:41pm

Publié par Henri Bacher

Dans les églises d’avant l’ère numérique, les responsables de communauté remplissaient des fonctions prédéfinies ou disons suffisamment paramétrées pour que les rôles soient interchangeables ou presque. Dans les églises historiques, le pasteur devait surtout savoir prêcher et enseigner et chez les catholiques, le prêtre devait connaître le rituel à appliquer dans telle ou telle circonstance. Mon analyse est certes un peu caricaturale, car derrière la prédication ou la pratique et la compréhension du rituel il y a l’acquisition d’un savoir très conséquent. Ce n’est pas pour dire que n’importe qui pouvait accéder à ce genre de responsabilité. Ce qui m’intéresse, c’est ce qui se passe aujourd’hui sous l’impulsion de la nouvelle culture. Actuellement, beaucoup de communautés qui démarrent ou qui progressent sont le fruit du travail d’une personne source qui ne remplit pas simplement une fonction prédéfinie.

La personne source part de son génie de créateur pour mettre en place un nouveau développement. Elle a une idée originale et très souvent elle vient de l’extérieur du système en place. L’église n’est pas la seule à avoir recours à des personnes source, mais ces dernières décennies, l’industrie a eu son lot de créateurs visionnaires. Steve Jobs, l’entrepreneur qui a lancé Apple, a cassé les reins, avec l’Itunes, aux grandes majors de l’industrie musicale et par la suite, il a fait de même avec les compagnies de téléphones classiques avec l’Iphone. Bill Gates, l’autre personne source a fait la nique à IBM avec son DOS et par la suite avec Windows.

Un exemple suisse Dans les années entre 1980 et 1990, le CEPA (Centre évangélique de productions audiovisuelles) en Suisse romande a été créé par un photographe professionnel du nom de Jean-Luc Ray. Lui aussi est venu de l’extérieur. Ce n’était pas un pasteur. A l’époque, il produisait des montages de diapos sonorisés, dont la qualité des contenus, tant du point de vue graphique que du point de vue théologique, étaient d’avant-garde. Il avait, auprès des groupes d’enfants, d’adolescents et d’adultes un réel succès. Je pense que la majorité des églises en ont profité. Et puis, en l’espace de deux ans, après le départ de Jean-Luc Ray, la personne source du CEPA, cet organisme a sombré corps et âme. Son créateur a quitté parce qu’il réorientait ses activités professionnelles.

Pourquoi l’échec? Tout simplement, parce que la personne source n’a pas continué à être sollicitée par ceux qui ont continué le travail du CEPA. Il faut dire qu’on a abordé ce problème de succession à l’ancienne manière. On croyait remplir une fonction, celle de la direction d’une œuvre. Je ne suis pas en train de faire le procès de certaines personnes, mais c’est le mécanisme qui est important à observer, pas la responsabilité morale. Ce sont des mécanismes universels. Steve Jobs a été remplacé à un moment donné par son conseil d’administration qui lui a préféré un dirigeant qui venait de l’industrie des boissons sucrées. Lorsque Steve Jobs, la personne source a été rappelée parce qu’Apple périclitait, la compagnie a de nouveau progressé pour devenir une des plus puissantes du monde. Jobs est mort et avec lui la personne source et je ne pense pas que Tim Cook, qui lui a succédé, va continuer sur la lancée.

L’exemple à suivre Bill Gates est pour moi, l’exemple intéressant à suivre pour nos églises ou organisations chrétiennes. Il y a déjà plusieurs années qu’il a quitté les fonctions opérationnelles du groupe Microsoft pour se consacrer à sa fondation humanitaire “Bill et Linda Gates”. La personne source a laissé le pouvoir à Steve Ballmer, mais le groupe n’a pas sombré pour autant. Pourquoi? Bill Gates est resté jusqu’à récemment au conseil d’administration de Microsoft. Ils avaient la personne source sous la main ou à portée de main. Voilà toute la différence.

Dans nos églises, il y a bien des personnes source. Pas seulement des chrétiens qui ont lancé des activités importantes. Une personne source n’a pas forcément besoin d’être au sommet de la hiérarchie. Il peut s’agir d’une activité périphérique. Ça marche tant que la personne est là et puis ça périclite, parce qu’on n’a pas pris soin de garder la personne source à portée de main.

C’est vrai que dans nos églises les personnes source sont parfois des pontes. Elles ont fait leur trou et ne sont pas prêtes à céder le moindre terrain. Comme elles sont respectées de par leur activité historique, il est difficile de leur dire de se mettre sur un strapontin, alors qu’elles aimeraient bien rester sur un trône, même s’il est honorifique. Moralité de l’histoire? C’est les personnes source, elles-mêmes, qui doivent se mettre en retrait et rester à disposition si on les sollicite. Et surtout, vous, ne mettez pas une personne source sur la touche. Il y aurait de fortes chances que votre oeuvre parte aux oubliettes.

Henri Bacher

Personne source ou comment garder une église qui prospère
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